Cela faisait des semaines qu'il n'avait pas plu. La terre craquelait de partout, le sol lézardait même au plus profond de la forêt et l'herbe commençait à jaunir alors qu'avril n'avait pas encore tiré sa révérence. Déjà le mois de mars avait été sec et les alertes météorologiques successives annonçant des cumuls de pluie importants concernaient d'autres régions. Sans présager de ce que serait l'été, des retards de précipitations important dès le printemps ne laissaient rien présager de bon.
Ce soir-là, alors que nous allions entreprendre notre balade quotidienne de confinés privilégiés, le ciel au sud avait laissé l'azur pour un gris qui s'intensifiait de minute en minute. La brise allait fraîchissant et, sous les arbres, le frou-frou des feuilles montait crescendo. L'air s'emplissait d'un je ne sais quoi d'électrique, comme si la tension emmagasinée dans les cumulo-nimbus faisait vibrer l'atmosphère. Le ciel promettait l'orage, mais dans les semaines précédentes, nombres de promesses n'avaient pas été tenues.
Arrivés au bord des étangs, nous vîmes que les reflets habituellement bleus avaient tournés au vert bouteille et la surface de l'eau se ridait sous les sautes de vent. Nous décidâmes de forcer le rythme, partagés entre l'envie de finir notre parcours traditionnel et la crainte de se faire rincer. Alors que nous étions parvenus au point le plus éloigné de notre boucle, les premiers grondements, faibles et indistincts pour l'instant, commençaient à se faire entendre. Il était encore possible de douter de leur origine, mais l'assombrissement du ciel donnait une indication qui ressemblait de plus en plus à un avertissement.
Qu'allaient donc nous apporter ces cieux noirs ? Quelques gouttes pour mouiller la poussière, un ou deux millimètres dans un pluviomètre, une pluie bienvenue et régénératrice, ou alors la grêle dévastatrice accompagnée de bourrasques prêtes à tout casser alentours ? Alors que nous nous posions la question, les premiers éclairs zébraient le ciel et le tonnerre faisait entendre des grondements qui se prolongeaient de plus en plus. La luminosité baissait et il paraissait de plus en plus probable que nous allions être trempés comme des soupes avant de rejoindre la maison. La balade tournait maintenant à la compétition et nous allongions autant que possible nos foulées dans l'espoir d'éviter le plus gros de l'averse. Nous avions regagné le couvert des arbres, pas forcément conseillé en temps d'orage, le rythme ne baissait pas. Plus qu'une centaine de mètres à parcourir, toujours pas de gouttes ... La route à traverser, nous arrivons au portail ... il peut maintenant pleuvoir !
Trés beau ce reflet sur l’eau. Biz