"Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme" - Lavoisier, chimiste français
Dimanche 11 septembre - Jura
Ce matin, je profite d'un passage dans le Jura pour rendre à nouveau visite à ma tourbière préférée. Il existe définitivement en ce lieu une force d'attraction particulière à laquelle je ne peux résister, et cette fois encore, je serai récompensé de ma venue !
Tout commence comme un rituel, un lever avant le jour, la préparation de mon matériel photo, et une sortie alors que le ciel commence à peine à s'éclaircir. Ce début septembre apporte déjà sa dose de fraîcheur nocturne et je ne peux réfréner un frisson avant d'entrer dans la voiture. Ces températures basses devraient favoriser l'apparition des fameuses brumes matinales. J'emprunte la route habituelle, en voiture tout d'abord, puis ensuite à pied, et arrivé à proximité de la combe, je perçois une fois de plus cette sensation de froid qui s'intensifie en quelques mètres parcourus. Sur ma gauche, la forêt cède la place à des prairies et à cette fameuse zone humide que j'ai tant photographié !
La brume est bel et bien là, courant sur les sols humidifiés, enfin, par les pluies récentes. Les clarines d'un troupeau de Montbéliardes résonnent dans cette large vallée entourée de sapins. Je traverse les champs en direction du sud, en direction de cette colline, en direction de ce chêne, point de repère intangible à l'échelle d'une vie d'homme. Le soleil commence seulement à effleurer les arbres les plus hauts de la partie ouest de la combe. Il illuminera bientôt la brume, et j'espère pouvoir retrouver la féérie que j'ai déjà eu la chance de voir à plusieurs reprises.
Cependant, alors que tout semble identique aux fois précédentes, la magie tarde à opérer. Sans que j'en comprenne les raisons, la brume s'effiloche, se dissipe plus vite qu'à l'accoutumée et j'ai l'impression d'assister à un matin banal, un lever de soleil comme il en existe tant. La chaleur du soleil se fait sentir petit à petit, et je décide de rentrer, m'accordant un détour en bordure de tourbière, histoire de jeter un dernier regard avant de quitter les lieux.
C'est à ce moment-là que la physique entre en scène, et que les événements prévus par les équations se réalisent, sans surprise. Ce que les savants n'ont pourtant pas réussi à modéliser dans leurs formules mathématiques, c'est que les lois de la nature peuvent également créer une bonne dose de poésie, mettant à mal la maxime de Lavoisier. L'humidité concentrée dans les feuillages, au contact des rayons du soleil, passe de l'état liquide à l'état gazeux, se condense et libère des volutes qui s'élèvent au-dessus de la végétation, donnant l'impression que la terre se met à respirer, à exhaler. La lumière matinale vient illuminer l'ensemble et dessine la silhouette des arbres sur ce fond très lumineux. Ce matin-là, la magie du monde me faisait un contre-pied et n'était pas là où je l'attendais, et c'est bien le moins qu'on puisse en attendre, n'est-ce pas ?
Comments